Citation:
« La seule chose, j’en reviens toujours là, c’est un gouvernement de mandarins. Le peuple est un éternel mineur. Je hais la démocratie. »
Flaubert et beaucoup d'autres gourous du XIX° siècle furent durablement marqués par les excès populaires, les massacres et les destructions massives de l'époque révolutionnaire.Constant, Dumas fils, Renan, Taine... La Commune n'a trouvé aucun grand écrivain ni grand intellectuel pour la défendre. Le spontanéisme des années 1789-1795 leur faisait horreur. C'est une des raisons qui fit que Monsieur Thiers qui avait osé "tirer sur le peuple"devint un parangon républicain à qui l'on dédia les plus belles avenues des grandes villes de France.
Le peuple est-il un éternel mineur ?
Personnellement je ne le crois pas.
Le suffrage universel a montré en 1848, et ensuite à plusieurs reprises, qu'il pouvait être conservateur.
Mais son conservatisme ne garantit pas contre la dictature du pire des hommes comme cela arriva avec Hitler.
Dès lors, pourquoi émets-je cette réserve sur la malfaisance de la démocratie que Flaubert et tant d'autres de son temps ne faisaient pas?
A cause de l'exemple américain.
L'Allemagne de l'entre deux guerres qui a ovationné Hitler était, de tous les pays du monde, celui qui avait atteint le meilleur niveau éducatif. Nulle part autant d'intellectuels de haut niveau, autant de prix Nobel, autant de dynamisme dans le domaine des industries de pointe comme la chimie, autant de diffusion culturelle. C'est en Allemagne qu'un Raymond Aron est allé se former à la philosophie critique de l'Histoire, si bien représentée par des Dilthey, Simmel, Max Weber...
Et pourtant!
C'est là qu'intervient la pensée de Tocqueville.
En Amérique la démocratie est un phénomène social et mental avant d'être politique.
Les hommes s'y sentent intrinsèquement semblables les uns aux autres et l'idée d'un homme providentiel comme ce fut le cas d'Hitler ne peut y prendre corps.
Cette "démocratie mentale" me semble avoir atteint les rivages de l'Europe d'après les trente glorieuses et sans doute aussi celles de l'Asie.
Le Japon, par exemple, mais aussi la Chine de Deng et de ses successeurs, semblent sur la bonne voie.
En somme, la démocratie qui est un poison violent n'est pas n'importe laquelle.
C'est la démocratie politique qui ne s'étaie pas sur une démocratie sociale et mentale.