il fallait un consensuel dur plutôt qu'un mou...
Les questions de personnes me semblent éclairées au mieux par un jugement de Pierre Pflimlin, politicien de centre-droit, loin d'être un incapable mais obligé de s'effacer devant de Gaulle en mai 58 pour avoir provoqué l'ébullition du 13 mai à Alger par le simple usage du mot "négociation" dans un discours.
Il est ministre en 62 au lendemain des accords d'Evian. Extrait de la conclusion de mon livre
On l’a beaucoup accusé de n’avoir pas manifesté de compréhension envers les pieds-noirs. Cela me rappelle l’exclamation d’Hermione dans l’
Andromaque de Racine : « Je ne t’ai pas aimé, cruel ! qu’ai-je donc fait ? ». Il leur a ouvert mille chemins, en première ligne, au risque de sa vie et sans souci de sa réputation. De ce point de vue, le témoignage le plus éclairant, dont on ne peut dire qu’il émane d’un homme lige, est celui de Pierre Pflimlin. Le dernier concurrent du Général sous la Quatrième avait été son ministre dans la seconde moitié de 1958. Il était revenu au gouvernement pour quelques semaines en avril 1962, avant la démission fracassante des quatre ministres MRP -dont Robert Buron, le négociateur d’Evian- à propos de la construction européenne. Il découvre lors du conseil du 25 avril un de Gaulle très remonté contre les Pieds-noirs :
Il déclare : « Les Français d’Algérie voudraient que cela continue, que rien ne change, c’est-à-dire qu’ils puissent continuer à tuer des musulmans. Il faut qu’ils sachent que de toute façon le scrutin d’autodétermination aura lieu le 1er juillet au plus tard et qu’ils n’ont donc plus que peu de temps pour changer de comportement. »
Et Pflimlin de commenter :
Citation:
Cette froide résolution, où l’on ne peut percevoir le moindre signe de compassion, ne manque pas de grandeur et en tout cas d’efficacité. Si de Gaulle était différent, s’il n’était pas comme un roc au milieu de tant d’hostilités, d’incertitudes, de lâchetés et de trahisons, quelle chance y aurait-il de voir aboutir sa politique qui, malgré ses erreurs de méthode, ses duretés, ses injustices, est fondamentalement vraie ?
Un président démagogue, soucieux de flatter l’opinion majoritaire pour assurer sa réélection, que n’eût-il financé en métropole avec les milliards du plan de Constantine et ceux qu’engloutissait le maintien sur place pendant quatre ans de plus de 400 000 soldats ? Il y a deux lectures possibles de ces mesures : soit un paravent, pour aller résolument depuis le début vers l’abandon du territoire au FLN, et c’est ce dont on accuse de Gaulle dans bien des proses en faisant de lui un Machiavel au petit pied, soit une volonté réelle de donner toutes ses chances à la « solution la plus française ».