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MessagePosté: Lun Jan 24, 2011 2:40 pm 
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Inscription: Ven Jan 07, 2011 5:55 pm
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L'histoire a fait de ce personnage le "fou volant" de l'année 1941 ,
deux choses viennent immédiatement à l'esprit lorsqu'on évoque son nom :
sa longévité en tant que prisonnier de la WW2 et son vol de 1941.
L'homme que nous montrent les documentaires de Nuremberg n'a manifestement plus toute sa tête
il est dès lors admis implicitement qu'il en était de même en 1941 , et par conséquent que son
initiative ne pouvait être que personnelle, non commanditée par Hitler cet autre "fou"...

Y a t-il eu un nouveau "gommage" de la diplomatie souterraine allemande entre 39 et 41
ou s'agit il réellement d'une initiative personnelle ?


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MessagePosté: Lun Jan 24, 2011 3:56 pm 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
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Le Reichstag s'est-il enflammé tout seul, à peine aidé par un Hollandais titubant ? Hitler a-t-il stoppé ses blindés devant Dunkerque par une brusque crainte pour les chenilles des chars ? Hess a-t-il décidé seul de son vol ? Ma tante en a-t-elle ?

Bref, l'action du gouvernement nazi est-elle calculée, ou avance-t-il en aveugle ?

L'affaire, déjà pas simple à débrouiller vu les dissimulations allemandes et britanniques, et le manque de curiosité du tribunal nurembergeois, a été encore complexifiée arbitrairement par le livre d'Allen, en partie fondé sur des faux.

Une chose devrait guider la réflexion : il s'était entraîné, et comment, au vol mais non au parachutisme. Il comptait donc atterrir... et revenir. Au moment du livre d'Allen (disant qu'il voulait atterrir chez le duc de Hamilton), un expert aéronautique anglais a paru trancher le débat en démontrant que le terrain était trop court, de beaucoup.

Mais John Harris, en 2010, dans Rudolf Hess / The British Illusion of Peace, a fait rebondir l'affaire en avançant qu'il voulait atterrir ailleurs : sur l'aéroport de Prestwick, récemment aménagé pour recevoir les plus gros bombardiers.


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MessagePosté: Mar Jan 25, 2011 7:57 am 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 11:49 am
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Localisation: Francais de Bangkok
Bonjour,
Il y a 2 manieres de repondre a cette question au sujet de Rudolf Hess :

1 - On part du principe que Hitler etait un abruti et ses proches complices en perpetuelle luttes intestines, dans le dos du Fuhrer, pour des parcelles de pouvoir.
Dans ces conditions, la these du fou-volant solitaire tiens la route.

2 - On reconnait que Hitler etait tres intelligent, un artiste quant a la manipulation des ames et des coeurs et ses proches collaborateurs d'une fidelite quasiment a toute epreuve.
La, la version d'une operation preparee par Hitler en personne devient evidente.

L'ennui, c'est qu'elle implique que cette mission de "paix" avait une chance de reussir, Hitler ne prenant que des risques fort mesures.
Et, par consequent, qu'en 1941 il existait toujours en Grande-Bretagne un courant "appeasers" susceptible de creer des difficultes a Churchill.
Sir Winston Churchill a copieusement menti dans ses Memoires a ce sujet, participant au montage de la legende d'un peuple uni comme les doigts de la main derriere lui des juin 1940.
Il n'est donc pas surprenant que, encore de nos jours, certaines archives restent inaccessibles car elles mettraient en lumiere certaines compromissions britanniques et, le pire, touchant egalement la famille royale, quelle horreur !

Claude, notre hote viens d'ecrire : Le Reichstag s'est-il enflammé tout seul, à peine aidé par un Hollandais titubant ?
Je ne peux pas m'empecher un coup de pub :
Voir sur le Reichtag le papier de ton serviteur dans l'Histomag'44 no. 67, septembre-octobre 2010, page 12 (et, accessoirement, l'article de Francois en page 5 ;-))
http://www.39-45.org/portailv2/download ... e-2010.php


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MessagePosté: Mar Jan 25, 2011 5:24 pm 
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Merci pour les liens Daniel , Histomag c'est du "sérieux".Je ne manquerai pas de lire.

Sur Hess il me semble semble effectivement que , sa santé mentale en 41 ne faisant pas de doute,
il n'y a que 2 possibilités ; a) il est mandaté , b) il ne l'est pas , dans les 2 cas nous pouvons déduire que
Hitler , dans son cercle rapproché a du se plaindre du bellicisme de Churchill , du temps perdu en batailles
périphériques (Balkans , Grèce) , de la difficulté à contacter des chefs anglais modérés (?), et il n'en a pas fallu
plus à Rudolf pour se lancer (hypothèse b),
ou alors, après que ce dernier ait offert d'aller contacter Hamilton
ou un correspondant "mystérieux" de son mentor Haushofer , il a reçu l'aval du dictateur.(hypothèse a)

Le sérieux de la préparation exigé par un tel périple et surtout le dévouement total de Hess à Hitler plaident
tout de même en faveur de l'hypothèse a.
D'ailleurs réponse a ou b, l'essentiel n'est il pas que cela démontre l'acharnement d'Hitler à faire cesser la guerre
avec l'Angleterre au besoin en essayant de court circuiter Churchill , et l'acharnement de ce dernier à la continuer ?

Une dernière question cependant , "La chronique de la 2eme guerre mondiale" (ed Legrand) basée sur les coupures de presse
d'époque évoque une arrestation de Willy Messerschmitt comme conséquence du vol de Hess.S'agit il d'une remontrance
par Goring ou d'un semblant de remontrance ?
Goring aurait été mis dans le coup en cas de mise en scène Hitler-Hess , n'est ce pas ?
Pensez vous que l'ouverture des archives en 2016 va apporter un "scoop"?


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MessagePosté: Mar Jan 25, 2011 5:31 pm 
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Anecdote : lorsque j'étais écolier à Berlin ouest entre 1969 et 71 mon père m'emmenait
parfois en voiture à l'école Victor Hugo le matin et, chaque fois que nous passions devant Spandau
il ne manquait jamais de pointer un index vengeur vers le bâtiment, en disant avec son
accent anglais :" ...regardey , il y a ce salaud de Hess , la dedans..."


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MessagePosté: Mar Mar 15, 2011 5:33 pm 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
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Martin Allen serait-il le Macpherson du XXIème siècle ?

Ce faussaire a publié au XIXème les poèmes d'un barde médiéval nommé Ossian, qu'il prétendait avoir trouvés dans de vieux grimoires et qui étaient intégralement de lui, ce qui ne les empêche pas d'être classés dans les chefs-d'oeuvre de la littérature universelle.

En l'occurrence, Allen a forgé, ou s'est laissé mettre en main par des faussaires, des documents qui permettent de suivre pas à pas une conspiration des services secrets britanniques, pilotée par Churchill en personne, pour attirer un haut responsable allemand en Angleterre.

Cependant, il y a dans sa construction pas mal d'éléments incontestés qui suffisent à étayer la thèse, même si, en retirant de l'analyse les documents expertisés comme faux, on suit de moins près les méandres de la conspiration.

Le plus important et troublant me semble être celui-ci, qu'il ne cite pas intégralement et que je viens d'aller récupérer en bibliothèque :
Citation:
Madrid, le 14 mars 1941 [70 ans hier !]

Le prince de Hohenlohe séjourne à Madrid. Ce grand propriétaire terrien de la région des Sudètes est bien connu dans les milieux financiers de Londres, de New-York et également de Madrid, pour avoir épousé une très riche Hispano-Américaine, Madame Yturbi. C'est aussi un homme de confiance de Hitler, qui se sert souvent de lui pour sonder les humeurs et les tendances du camp ennemi, ainsi que pour remplir des missions secrètes à titre d'agent officieux.

Il me revient de source sûre que Hohenlohe s'est entretenu ces jours-ci avec l'ambassadeur d'Angleterre, sir Samuel Hoare, et en a obtenu des déclarations qui peuvent se résumer ainsi : "La situation du gouvernement anglais ne serait plus aussi solide. Churchill, malgré la récente loi américaine en faveur d'une aide à la Grande-Bretagne, ne disposerait plus d'une majorité. Hoare prévoit, en conséquence, qu'il sera tôt ou tard rappelé à Londres pour prendre la direction du gouvernement, avec l'objectif précis de rechercher une paix de compromis. Sur ce chapitre, il a déclaré avec la plus grande énergie qu'il n'accepterait cette charge qu'à condition de disposer des pleins pouvoirs. Il a ajouté qu'Eden serait écarté de la direction des Affaires étrangères pour occuper un autre poste dans le cabinet, et remplacé par l'actuel sous-secrétaire d'Etat Butler, qu'il a présenté comme un homme plein de bon sens et parfaitement à la hauteur de la dure tâche qui lui incombera.

L'ambassadeur d'Allemagne, également informé de l'entretien en question, a adressé à Berlin des informations similaires.

(source : Documenti diplomatici italiani, Nona serie, vol VI, Istituto poligrafico e Zecca dello Stato, Rome, 1986, p. 701.)


D'après Allen, Hoare jouait déjà ce jeu-là depuis novembre. Cela me paraît douteux, pour toutes sortes de raisons. En revanche il est clair qu'à la mi-mars il rattrape le temps perdu ! Mais une chose n'est pas moins claire : une telle démarche ne saurait être faite qu'avec l'aval de Churchill et en en coordination étroite avec lui (notamment par l'intermédiaire d'Alan Hillgarth, son homme de confiance et celui du MI 6 en Espagne). On ne voit pas en effet un "parti de la paix", englobant Butler, annoncer avec autant de netteté à Hitler qu'il entre en conspiration... si c'était vrai.


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MessagePosté: Ven Mar 18, 2011 3:50 pm 
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Je suis bien d'accord sur le fait que le "pilotage" en sous main d'une telle opération est à la fois typiquement british et typiquement
"Churchillesque" , mais cependant l'intérêt politique d'une telle manoeuvre me semble plus nébuleux.En Mars 1941 l'Angleterre subit
l'action des sous marins allemands de plein fouet , elle n'est nulle part en position de se confronter en force à l'armée allemande
sur le continent européen dans une bataille territoriale , bref prendre Hitler la "main dans le sac" d'une action de diplomatie
souterraine ça présente quel intérêt pour un premier toujours fragile et qui n'a que les bonnes paroles de l'oncle Sam a offrir à ses
compatriotes ?


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MessagePosté: Ven Mar 18, 2011 4:59 pm 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
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Attention à ne pas contredire le réel sous prétexte qu'il serait illogique !

Le document du 14 mars (dont je m'aperçois que j'ai omis l'auteur : Lequio, ambassadeur d'Italie à Madrid) est incontesté et incontestable. Il y a donc eu dans les heures précédentes communication par Samuel Hoare, à l'adresse de Hitler, d'informations sensationnelles sur une conspiration pour renverser Churchill, dont lui-même serait le bénéficiaire, la composition du gouvernement et sa politique de rapprochement avec le Reich étant déjà bien définies.

Et les historiens ont négligé la chose jusqu'à ce que Martin Allen la découvre dans un recueil publié vingt ans plus tôt.

Cela aussi est illogique ! On pourrait penser que quand paraît un tome de documents diplomatiques d'une grande puissance en guerre les historiens spécialistes des relations internationales pendant cette guerre se précipitent avec une professionnelle gourmandise, pour ajuster toutes leurs analyses antérieures en fonction des nouveautés. Eh bien non ! Mais cela a aussi sa logique...

Qui prend en compte ce document doit se demander (j'en demande à l'avance pardon aux chastes oreilles de Michel Boisbouvier, qui ne peut supporter l'idée que les adultes mentent parfois) si Hoare est au premier ou au second degré.

Je pense qu'on peut trancher en toute sécurité dans le sens du mensonge et de la manipulation. Hoare aurait eu mille raisons et mille occasions de déployer une telle méfiance envers Churchill et un tel pessimisme sur la tournure de la guerre, depuis son arrivée à Madrid fin mai 40. Il s'en est bien gardé, il a toujours soutenu la politique officielle de son gouvernement vis-à-vis de tout étranger. Pour qu'il s'affranchisse brusquement de toute prudence et dévoile une conspiration, il faut que ce soit du bidon car sinon il aurait brusquement changé de caractère, devenant d'une folle imprudence. La preuve : Lequio est tout de suite au courant. Ce qui veut dire que, par ses antennes au Vatican, le MI6 britannique ne va pas tarder à l'être, et alors Hoare ne contrôle plus rien : Churchill peut apprendre sa félonie d'un jour à l'autre. Si félonie il y a.

En revanche, il est fort intéressant de voir qu'à ce moment Churchill éprouve le besoin d'intoxiquer Hitler sur sa propre fragilité. Et ici l'explication d'Allen mérite examen : il espère Barbarossa, mais il ne peut ni n'ose compter dessus, et comme Hitler ne peut rester immobile tandis que ses ennemis potentiels se réveillent et s'arment, il est fort à craindre, et Churchill craint, que l'orage n'éclate sur le Moyen-Orient, où déjà Rommel débarque, où déjà Rachid Ali gouverne l'Irak, etc.

Il a donc bien l'air de dire : je suis certes un bouledogue obstiné qui ne lâchera pas le morceau, mais je ne suis pas si dangereux puisque je vais être viré ! à une condition : c'est que tu ne tapes pas trop fort sur les positions britanniques...

C'est tordu, mais encore une fois cela existe, et il faut bien l'expliquer !


PS.- si cette thèse se confirme, on pourra dire que Churchill a rendu à Hitler la monnaie de sa pièce, plus encore qu'on ne le croyait : car le tour le plus efficace du chef gammé n'était-il pas de faire croire que son pouvoir était fragile et qu'il était tiraillé entre ses lieutenants ?


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MessagePosté: Sam Mar 19, 2011 4:54 pm 
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Inscription: Ven Jan 07, 2011 5:55 pm
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Cela est énorme mais semble néanmoins parfaitement cohérent avec la solidarité sans faille démontrée par tous les expatriés
anglais qu'ils fussent diplomates , journalistes, ou espions ,avec leur gouvernement en lutte, même quand sa position était précaire.
En somme , la fragilité de Churchill serait l'appât , Hoare l'hameçon et Hess le gros poisson qui y aurait mordu...on peut aisément
imaginer l'intérêt que cette prétendue perspective de renversement de Cabinet a du susciter chez Hitler lui même , avec la
possibilité d'un armistice anglo-allemand juste avant Barbarossa.
De quoi faire saliver le patron du III eme reich et justifier l'envoi de Hess qui même en cas de non retour ne jouait de toutes façons aucun rôle à l'état major allemand et n'était déjà plus le numéro deux du régime en Mai 41.En cas d'échec , il suffisait de ne pas le reconnaître , et en cas de succès le bénéfice aurait été incalculable pour le régime nazi.


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MessagePosté: Jeu Avr 28, 2011 2:13 pm 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
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On trouvera sur le site http://www.delpla.org/article.php3?id_article=479 une lettre d'information expédiée hier et renvoyant à un dossier de la rubrique "blabla" http://www.delpla.org/article.php3?id_article=489 sur quelques débats internautiques récents à propos de Hess, notamment sur "Le Monde en guerre" http://www.39-45.org/viewtopic.php?f=17&t=27497&start=0

Moi qui suis habitué à voir critiquer mon travail et vais même sur les forums en grande partie pour cela, j'avoue que je ne pensais plus possible un pareil tombereau d'insultes, propre à déshonorer ses protagonistes si des pseudonymes, parfois variables, ne les protégeaient.

Je serais intellectuellement nul, inventeur de théories sans fondement, propagateur d'elles sur les forums dans une indifférence complète aux objections et aux questions...

La simple lecture du fil cité et de ce que j'appelle (à mon grand regret) les métastases sur d'autres forums ( http://deuxiemeguerremondia.forumactif. ... -hitlerien http://www.passion-histoire.net/n/www/v ... a&start=45 ) montre que dans la plupart des cas les compliments peuvent être à bon droit retournés ; c'est à mes questions qu'on ne répond pas, ce sont mes objections qu'on ignore. Et on se met à chasser en meute, en ne reprochant jamais à l'animal d'à côté ses lapsus, dans un numéro dont, sur ce forum, seules les politesses entre Jean (Kimono) et Boisbouvier sur Pétain donnent une petite idée, quand elles les rendent incapables de se reprocher mutuellement fût-ce une bénigne faute de grammaire.

Le bouquet : ces gens affirment, d'un commun accord et sans honte aucune, même après mes amicales remontrances, une nouvelle règle de méthode en histoire. Le preuve serait exigible pour les théories nouvelles, mais non pour les anciennes !

Tout cela est évidemment, pour un chercheur, très encourageant. Certes, cette hystérie ne saurait elle-même faire figure de preuve. Comme je suis assez souvent amené à le répéter, notamment à l'adresse d'un Boisbouvier, les débats des années 2000 sont impuissants à modifier le cours des choses dans les années 1940. Le spectacle des réactions extrêmes que suscite l'idée que Hitler pourrait avoir été complice de Hess lors de la préparatioin de son vol est, néanmoins, très instructif. Il y a là comme un soubresaut de bête touchée à mort. Ce ne sont pas les animaux de la meute que je désigne ici ! Mais l'hydre du préjugé d'un nazisme aussi bête qu'il était méchant.

Ah qu'on était à l'aise quand on pensait n'avoir à décrire qu'un nazisme brutal, bas de plafond, dont les étrangetés se réduisaient aux coups fourrés mutuels de sous-mafias rivales !

Il est en train, le Malin, de prendre toute sa dimension diabolique, en même temps qu'on perçoit mieux la logique de sa folie.

Prenons un pari : en 2021, il semblera étrange qu'on ait pu douter que Hitler ait envoyé Hess. Mais pour ceux qui n'auront pas la mémoire trop courte, il sera amusant de compter les opportunistes qui "l'avaient toujours dit" !


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MessagePosté: Dim Mai 01, 2011 4:20 pm 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
Messages: 6779
Le fil originel http://www.39-45.org/viewtopic.php?f=17&t=27497&start=0 étant fermé depuis quatre jours au lieu des deux annoncés, sans doute pour des raisons techniques, c'est donc ici que je publierai des "billes nouvelles" annoncées là-bas.

Il s'agit du journal du général Halder, un document saisi par les Alliés à l'état brut, absolument pas suspect de traficotages ultérieurs et guère d'autocensure, si ce n'est peut-être en matière de persécution des Juifs. C'est un instrument de travail, permettant au chef d'état-major de l'armée de terre allemande (jusqu'à la veille de Stalingrad) de se souvenir de ce qui s'est dit pendant les réunions et les entretiens, et qui peut intéresser son lourd service.

Le 14 mai 1941, il note :
Citation:
Entretien avec le commandant en chef [Brauchitsch] sur son entretien avec le Führer

1 Affaire Hess. Tentative d'unification des races germaniques.(suivent trois autres points sur la situation militaire et politique)


Et le lendemain, après les événements du matin :
Citation:
Réunion avec tous les chefs de section de l'OKH : Affaire Hess !

I Le compte rendu des événements du Führer au commandant en chef correspond au second communiqué de presse, plus détaillé.

1 Le Führer a été pris complètement par surprise.

2 Faits précédemment connus :

a) Conflit intérieur croissant chez Hess entre son attitude personnelle envers l'Angleterre et sa désolation devant les luttes fratricides entre les deux nations germaniques.

b) Dépression due au fait que le Führer lui a interdit tout service de guerre actif; ses demandes répétées d'être envoyé au front ont été repoussées.

c) Tendances mystiques ("visions", prophéties, etc.)

d) Ses vols casse-cou, qui ont amené le Führer à lui interdire tout vol.

3 Nouveaux faits apparus :

a) Depuis août dernier, Hess s'est fait constamment communiquer les rapports météorologiques concernant le temps en Angleterre.

b) Tentative de se procurer des informations sur le guidage radio par Terboven (trafic radio).

c) Entraînement systématique par Messerschmitt, après un refus d'Udet.

d) Planification de préparations techniques pour le vol (réservoirs supplémentaires).

4 Chronologie des événements :

a) Samedi : le Führer a reçu un colis de documents et l'a mis de côté, pensant qu'il s'agissait de quelque mémorandum. Il l'a ouvert plus tard et a trouvé une lettre exposant le projet et en expliquant les raisons. Il indiquait Glasgow comme sa destination. Il avait l'intention d'aller voir le duc de Hamilton (président de l'association anglaise des Vétérans).

b) Concertation entre le Führer, le maréchal du Reich [Göring] et Udet pour déterminer si Hess avait une chance d'arriver à destination. la réponse étant affirmative, et les Britanniques ne pouvant manquer d'exploiter l'incident, un bref communiqué fut transmis à la presse. Ribbentrop envoyé à Rome pour informer le Duce (offre de paix séparée).

c) Convocation de tous les ministres et Gauleiters, auxquels on lit les documents relatifs à l'affaire.

II Tous les présents ont l'ordre de faire circuler l'information et de démentir toutes les versions divergentes.


Premiers commentaires :

Il y a eu visiblement deux entretiens entre Hitler et Brauchitsch, le premier le 14 et le second dans la matinée du 15. Le premier jour, la question est abordée d'emblée mais parmi d'autres, le second elle fait l'objet, sans doute unique, de la convocation du général par le dictateur, et certainement unique de la réunion des chefs de service de l'armée qui s'ensuit, dans l'après-midi.

Le premier jour (le 14) Hitler ne désapprouve pas l'initiative et a même l'air d'en attendre un résultat très désiré : l'"unification des races germaniques". Le lendemain, cet espoir est, semble-t-il, tombé. Peut-être sous l'effet de l'annonce par Churchill d'une déclaration officielle du gouvernement sur Hess aux Communes, pour le 15 ? L'annonce est faite le 13 et probablement répercutée dès ce jour-là en Allemagne, mais peut-être Hitler se raccroche-t-il encore à l'espoir que cette annonce suscite des réactions hostiles à Londres, et perd-il ensuite cet espoir ?

Toujours est-il que, le 15, se met en place une grosse artillerie, visiblement préparée à l'avance : une version complète et bien léchée de l'affaire, disculpant le Führer de toute complicité et insistant sur le dérangement mental de Hess, une série de réunions destinées à diffuser cette version officielle.

Remarque importante : il n'est pas question d'un projet de parachutage et la destination indiquée n'est pas Dungavel, mais Glasgow -ce qui serait cohérent avec la récente hypothèse de John Harris, suivant laquelle Hess comptait atterrir à Prestwick (qui est alors à Glasgow ce que Le Bourget est à Paris).


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MessagePosté: Dim Mai 01, 2011 6:43 pm 
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Inscription: Ven Jan 07, 2011 5:55 pm
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Ce qui est absolument certain dans cette affaire et que votre document confirme (et c'est peut être la seule certitude qu'on peut avoir
aujourd'hui) , c'est que les "explications officielles" ont été particulièrement bien préparées ,et ce des deux côtés de la Manche !
Tellement bien préparées qu'elles concordent (sur la folie de Rudolf) et que 70 ans après nous sommes toujours dans l'incertitude ...


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MessagePosté: Dim Mai 15, 2011 2:19 pm 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
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Voici un exemple propre à montrer qu'il peut y avoir encore bien des pièces intéressantes dans les archives alors qu'elles sont réputées ouvertes :

http://www.sar.nationalarchives.gov.uk/ ... ece=101/4B

Il s'agit là d'un dossier de Churchill, portant sur l'année 1942, qui a fait l'objet, à l'occasion du classement des archives avant leur ouverture normale au bout de trente ans, d'une décision de non-communication : il a été et reste "retenu par le département". Il peut porter aussi bien sur Rudolf Hess que sur les armes nucléaires ou bactériologiques, sur les relations avec de Gaulle ou sur quelque insinuation concernant la santé de Staline.

La décision peut être régulièrement réexaminée et l'objet estimé toujours "sensible", ou le document dormir, oublié, sous sa poussière originelle.

L'usager peut certes demander un réexamen du cas... mais par où commencer ? Les cas de ce genre se chiffrent, au bas mot, par centaines.


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MessagePosté: Lun Juin 06, 2011 7:55 am 
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Inscription: Sam Juil 01, 2006 8:20 am
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Le débat devient intéressant par la fuite des tenants de "Hess solitaire" :

-verrouillage d'un fil au moment où son principal tenant est à bout d'arguments (sa preuve décisive consiste... dans les déclarations de Hess !) sous le prétexte surprenant (et entièrement faux) qu'il tourne en rond... et que des intervenants demandent ledit verrouillage : http://deuxiemeguerremondia.forumactif. ... ien#177510

- sur LDG : http://www.livresdeguerre.net/forum/con ... ndex=50392 ,
soutien très surprenant de notre ami Lebel à ce "paroledehessolâtre", doublé d'une minimisation des implications de l'affaire :
Citation:
Il s'agit en realité d'un epiphenomène , à la limite anecdotique , sans portée immédiate et qui n'a aucunement influé sur le cours ulterieur de la guerre
D'autres enigmes historiques , et d'une autre importance , de la 2è GM ,meriteraient , elles , qu'on en debatte

Ma réponse :

Citation:
C'est l'un des plus étranges comportements internautiques que celui consistant à demander l'arrêt d'une discussion, alors qu'il est si simple de ne pas cliquer.

Très souvent, l'argument invoqué est qu'on tourne en rond alors que ce n'est même pas vrai !

En l'occurrence, Tie-tie 07, certes, se répète, mais son malaise est patent et il est clair que ses arguments se fondent essentiellement sur la discussion elle-même, où les partisans de la thèse qu'il réprouve sont accusés, d'une manière on ne peut plus légère et fantaisiste, de ne pas lui répondre et de ne pas invoquer de preuves. Or la discussion fait évoluer les siennes preuves... à la façon d'une peau de chagrin : dans sa dernière intervention, le seul répondant, censé pourvoir à tout, est la parole même de Hess. Le rappel, fréquent, du fait qu'il s'agit non seulement d'un dirigeant nazi auteur de nombreux mensonges avérés et de coups en douce avec Hitler parfaitement établis, mais d'un théoricien de la légitimité du mensonge en politique, n'y fait rien et ne fait jamais l'objet de la moindre réponse.

De plus, la méthode historique la plus élémentaire qui veut qu'on se demande, devant toute déclaration orale ou écrite, si son auteur a des raisons de mentir, aboutit ici à une conclusion nette et sans bavure : oui, puisqu'il s'agit d'un agent arrêté en territoire ennemi et qu'il est de règle universelle, en pareil cas, si on n'opte pas pour la trahison, de compromettre le moins possible son gouvernement.

Loin d'être superficiel ou marginal, ce débat touche au coeur même de la question nazie et de l'usage qu'on doit en faire aujourd'hui. S'agit-il de maintenir une vision moraliste et manichéenne d'après laquelle il s'agit d'un ramassis de méchants, non seulement envers les autres mais entre eux, et il serait à la fois vain et vilain de démêler les mobiles et les machinations de chacun, ou va-t-on en venir enfin à une juste appréciation du talent et de l'unité de direction qui seuls sont à même d'expliquer la durée et l'ampleur des dégâts ?


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MessagePosté: Sam Juin 11, 2011 1:04 pm 
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Le débat atrophié sur le vol de Hess est une grande déception pour ceux qui ne se contentent pas des vérités "officielles".
Car enfin , il faut avaler bien des couleuvres et ignorer bien des incohérences pour avaliser la thèse de l'acte solitaire:
ce foldingue de Hess a agi seul, et personne, dans ce gigantesque asile psychiatrique qu'est le IIIe Reich n'était au courant de son initiative !
Ceci dit , il faut bien reconnaître que la thèse inverse est tout aussi difficile à faire tenir , diplomatie en sous main , donc furtive ,
manipulations des écrits par les services secrets , silence de l'interessé , bref j'en suis venu à penser qu'au lieu d'opposer les deux
visions pour en éliminer totalement une au détriment de l'autre, il faut peut être les "panacher" pour s'approcher de la réalité.

Je m'explique ; le projet d'envoyer un émissaire de haut rang en Angleterre après les appels du pied diplomatiques précédant
(et pendant ?) la campagne de France , a très bien pu être arrêté à la fin de l'année 40 , au vu de la situation du moment.
Que Hess soit cet émissaire semble assez logique , il appartient au trio de tête du régime , a eu des contacts avec les anglais , peut piloter un avion jusqu'en Ecosse , et enfin n'a pas une utilité directe au QG allemand faute de compétences "stratégiques"...
Cela expliquerait qu'il ait commencé à s'entrainer dès la fin de l'année 40.Début 1941 Hitler change d'avis progressivement au vu
de l'entêtement britannique , de l'impossibilité d'accomplir Seelowe ,de la non destruction de la RAF , de l'urgence à attaquer une URSS qui se réarme rapidement ,etc... mais ne juge pas utile de décommander formellement la mission Hess car elle n'avait pas été formellement ordonnée et datée.
Ce dernier sentant, début 1941 que l'occasion d'accomplir un coup d'éclat va lui échapper décide de se lancer dans l'aventure malgré tout.

- Si les appels du pied diplomatiques de l'Allemagne en direction de l'Angleterre ont bien eu dès le départ une origine hitlérienne ,il
n'y a pas de raison pour qu'il en soit autrement de la mission Hess ...
- Le fait que les anglais aient été en "stand-by" , prêts à accueillir un émissaire allemand début 41 plaide en faveur de discussions
préalables en sous main...
- La solution pour élucider le mystère Hess passe peut être par le rétablissement précis du "timming" des faits : quand l'idée de l'envoi
d'un émissaire a t-elle germé , quand le projet a t- il été décidé et quand a t-il été (ou non) annulé ?
- Quelle a été l'ampleur des discussions sur le sol neutre de l'Espagne entre émissaires allemands , italiens et anglais ?

Autant de questions que les internautes barricadés derrière la "version officielle" n'ont même pas voulu envisager...


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