Point d'ordre : merci de poster chaque message en un seul exemplaire.
Ton interprétation du protocole de Wannsee (qui d'ailleurs ne consiste pas en des minutes, et ne prétend pas "tout" dire de la conférence) est au premier degré.
C'est une erreur (certes classique) de penser que cette conférence est réunie pour prendre une décision. Il s'agit bien plutôt, pour l'essentiel, d'informer un certain nombre de participants (essentiellement ceux qui ne sont pas de hauts gradés SS) d'un projet un peu vague concernant l'ensemble des Juifs d'Europe et, si possible, d'Afrique du Nord. Au bout du compte, on les fera tous mourir, mais ce n'est pas dit de façon aussi directe (deux ou trois choses là-dessus sur le site dont nous débattons :
http://www.delpla.org/article.php3?id_article=135 http://www.delpla.org/article.php3?id_article=189 ). Tout indique que ce génocide a été ordonné par Hitler à Himmler avant le mois de décembre -l'hypothèse d'Edouard Husson suivant laquelle il aurait été signifié, pour des raisons rituelles, le 9 novembre, jour emblématique dans la geste nazie, tient toujours.
En conséquence (et je m'inscris là-dessus en faux contre les analyses de Florent Brayard cf.
http://www.delpla.org/article.php3?id_article=408 ) c'est aussi voir trop les documents au premier degré que d'affirmer que Himmler prendrait brusquement en juin une décision d'accélération, pour des raisons tenant à la conjoncture de l'heure.
Sur ce coup-là, je serais plus ... fonctionnaliste !
Il faut bien aller doucement au début, puis monter en puissance. En juin, certes, l'assassinat de Heydrich, attribué à Churchill (point complètement à tort), peut jouer un rôle dans la décision et en joue certainement un dans son habillage (ne serait-ce que le nom d'"opération Reinhard"), mais ce délai de six mois permet aussi des tâtonnements et des mises au point, après lesquels tout est fin prêt : un rappel général doublé d'un délai stimulant les énergies est dans l'ordre des choses. Et le ressort principal réside toujours dans l'ordre donné par le dictateur à l'automne.
Quant au gouvernement fantoche de l'Etat français, il est bien loin de soupçonner tout cela comme de chercher à s'en enquérir. Il est tout entier englué dans le piège nazi, consistant à enrôler tous les gens possibles dans des besognes criminelles, en les salissant et en leur coupant la retraite. Mais en leur laissant aussi vaguement un doute, qui dédouane à peu près leur conscience, les fois où ils en viennent à se poser des questions.