Alain Michel a écrit:
François Furet, il y a cinquante ans, avait osé remettre en question l'approche idéologique de la révolution française telle qu'elle était monopolisée par les historiens marxistes de l'époque
Gare à la paranoïa !
Puisque vous êtes nancéien, peut-être avez-vous entendu parler de Paul Courtier, sympathique prof d'histoire maurrassien de la khâgne de Poincaré. Sa bibliographie écrite sur la Révolution, qu'on pourrait sans doute retrouver, comportait à côté de "Gaxotte, tendance royaliste", "Soboul, tendance marxiste". Il est vrai que Gaxotte n'était pas prof de fac et que la droite universitaire n'avait guère investi le sujet, mais de là à parler de monopolisation... Il ne faudrait tout de même pas oublier les rapports de force issus de Yalta.
Quant à Furet, bienvenu comme tout couac, il avait ses simplismes, notamment à propos du nazisme. Il me reçut un jour pour en discuter puis ne donna pas suite. J'eus un peu plus de chance avec Le Roy Ladurie
http://www.asmp.fr/fiches_academiciens/ ... 281099.pdf !
Alain Michel a écrit:
il est tout à fait typique que pour contrer mon argumentaire sur la responsabilité de Vichy dans la Rafle du Vel d'Hiv, vous m'opposiez non pas une citation d'archive ou un témoignage de l'époque mais une citation du président de la République.
Surprenant. Relisez.
Alain Michel a écrit:
que vous m'expliquiez votre lecture du document du 8 juillet 1942, dont je fais une courte citation, et qui montre qu'il n'y a pas d'autonomie de la police française en zone occupée à cette date, et où il est précisé que ce n'est pas Bousquet qui confirme à la police de zone nord la légitimité des ordres allemands, mais bien les Allemands eux-mêmes. Certes à Paris il n'y a pas d'Allemands dans les rues le 16 juillet. Mais en quoi cela démontre l'implication d'une décision de Vichy?
Dans la question juive, la police parisienne collabore avec les nazis depuis septembre 1940. Sans en référer le plus souvent au gouvernement de Vichy et pratiquement sans intervention de celui-ci. Pourquoi en serait-il autrement en juillet 1942, alors qu'en plus les comptes-rendus de la préparation de la rafle nous montrent que ce sont les Allemands qui donnent les ordres?
J'attends donc que vous me montriez le ou les documents qui prouvent : a) qu'il y a un ordre de Vichy à la police de zone nord d'exécuter la rafle; b) que cet ordre est lié à l'état d'avancement des négociations sur l'autonomie de la police française en zone nord; c) que si cet ordre n'avait pas existé, la police parisienne n'aurait pas participé à la rafle.
Je ne puis que vous donner raison... sur le plan formel uniquement.
Je manque de temps pour relire Klarsfeld et soupeser ses formulations... et c'est peut-être une bonne chose, car l'essentiel n'est pas là et je vous serais reconnaissant de ne pas encourager de votre autorité notre acariâtre colistier Boisbouvier à délaisser l'histoire des années 40 pour la dissection orientée des proses historiennes des décennies qui nous en séparent.
Je n'ai hélas pas sauvegardé avant envoi mon post d'hier sur votre blog, rien n'avertissant d'une modération a priori, mais je me souviens qu'il partait des lignes suivantes de votre texte :
Citation:
Il faut bien comprendre cependant que, si les Allemands refusent cette demande, Vichy ne peut rien faire. En effet, depuis le début de l’occupation, la police française de zone nord se doit d’obéir aux autorités d’occupation en vertu de l’application de la Convention de La Haye de 1907 et de la Convention d’armistice de juin 1940 (il n’y a pas à entrer ici dans le débat juridique sur l’abus qu’ont fait les Allemands de ces Conventions puisque cet abus a été accepté tant par Vichy que par les fonctionnaires de Zone nord, même si parfois des protestations sont émises).
"il n’y a pas à entrer ici dans le débat juridique ". Bien sûr que si !
C'est un bien curieux sauveur de Juifs qu'un régime qui, après avoir signé un traité d'armistice dont l'application était édictée jour après jour à Wiesbaden en présence de ses représentants, en admettait une interprétation exorbitante du droit et du bon sens.
Les droits de la puissance occupante comme l'obligation de la police occupée à collaborer avec elle ne s'appliquent qu'à ce qui concerne le confort et la sécurité de la puissance occupante, et tout particulièrement de ses troupes. Il est en particulier formellement (au sens fort de l'adverbe) interdit de modifier la législation de l'occupé si elle ne regarde en rien l'occupant. En prétendant que les bébés juifs constituent une menace, le MBF, Abetz et le SD agissent en tant qu'instruments de la folie hitlérienne, et non en tant que rouages d'une occupation classique.
Après Wannsee, le Reich entreprend méthodiquement de rafler pour les tuer les Juifs d'Europe et, si possible, d'Afrique du Nord, en passant le continent "au peigne fin d'ouest en est". C'est là un changement radical, par rapport notamment au sens antérieur du mouvement, qui tendait plutôt, en France, à chasser les Juifs vers la zone non occupée. La collaboration policière prend alors un tout autre sens et mériterait bien d'être repensée à Vichy. Elle l'est, d'ailleurs, à partir des contacts que prend Laval après son retour au gouvernement, et surtout à l'occasion la longue visite de Heydrich en mai. On se dirige dès ce moment-là vers un troc : vous nous rendez notre autorité directe sur la police de zone nord, et elle collabore à vos besognes les plus basses et les moins obligatoires.
Cependant, si les modalités sont nouvelles, le principe ne l'est nullement. Il est celui même de l'armistice et des premières mesures de Vichy. Partant du postulat que l'Allemagne a gagné la guerre, et que la seule chance de sauver de la France quelque chose est de "mettre Hitler en confiance", on en rajoute dans un antisémitisme censé le séduire.
Vous pouvez constater à quel point je diffère, en la matière, d'un Klarsfeld comme d'un Paxton, en montrant que Vichy n'est pas d'abord mû par des considérations de politique intérieure (revanche contre Dreyfus etc.), mais avant tout adonné au décryptage des attentes de l'Allemagne.