L'Epuration est allée plus loin. Puisqu'elle a même fait emprisonner d'authentiques résistants comme Jacques Lemaigre-Dubreuil qui fut un des artisans du... débarquement américain au Maroc et en Algérie. Oui, mais voilà, Lemaigre-Dubreuil n'était ni gaulliste, ni communiste... Ecoutons ce qu'en a dit Louis Rougier à la Libération, je cite:
"Le récent livre de Kenneth Pandar, Adventure in Diplomacy,our French dilemma (Dodd, Meat and Co? Nex-York, 1945), les révélations dans Collier's (janvier et février 1946) du général Holmes, conseiller d'Eisenhower au moment de l'invasion de l'Afrique du Nord,venant après la publication du livre de M. de Kérillis De Gaulle dictateur, ont substitué d'une façon définitive l'Histoire à la légende. La légende propagée par la presse gaulliste officielle sous la signature de F. Quilici dans La Marseillaise, par Paul Winkler, faux témoin au procés Pétain, dans la revue communiste The Protestant, par Waverly Root, dans le second volume de The secret History of the War, sans oublier l'Agence d'Information et de Presse de Robert Valeur à New-York, voulait que le général Giraud ait été libéré de la forteresse de Königstein par les soins de la Gestapo et de la Banque Worms, afin de dériver sur un terrain secondaire l'effort de guerre des Alliés et de favoriser sur toute l'économie européenne, l'emprise d'un consortium de financiers et d'industriels franco-allemands. Parmi eux figurait, en première place, un des représentants des Huiles Lesueur, Jacques Lemaigre-Dubreuil. L'histoire véridique rétablit ainsi les faits. Qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, Lemaigre-Dubreuil fut, dès février 1941, à l'origine des pourparlers qui devaient aboutir, le 2 novembre 1942, aux accords Giraud-Murphy. Travaillant d'abord avec le capitaine Baufre, puis de concert avec Van Hecke, Jean Rigault et de Saint-Hardouin, Lemaigre-Dubreuil fut le civil qui prit le plus de risques et contribua le plus efficacement au succès du débarquement des Alliés en Afrique du Nord. Lemaigre-Dubreuil et Jean Rigault auraient pu légitimement s'attendre à voir leurs noms figurer sur le palmarès de la Résistance, au lendemain de la libération. Il en fut tout autrement. Bien loin d'être inscrits au Livre d'Or, ils furent emprisonnés et inculpés devant le Premier Tribunal Militaire de Paris, sous le double chef de "trahison", et de "franchissement irrégulier des frontières". Après quatre mois de détention, l'inculpation aboutit à un non-lieu, à la levée des sequestres de leurs biens et à leur remise en liberté. L'inculpation de trahison pour "intelligence avec une puissance étrangère"; ne fut pas retenue, car il s'agissait d'une nation amie, les Etats-Unis, et l'ordonnance du 22 février 1943, réglementant la circulation en Afrique, ne visait que ceux "qui tenteraient de rejoindre le gouvernement de Vichy". L'aventure de Lemaigre-Dubreuil ne saurait étonner que ceux qui feignent d'ignorer encore que le crime suprême, dans la France libérée d'aujourd'hui, est celui de "la Résistance non orthodoxe". Vous pouvez revenir de Buchenwald:aucun secours ne vous sera offert si vous n'avez pas appartenu à un "réseau"qui s'était mis sous la dépendance du "Chef". Vous pouvez avoir trafiqué avec l'Allemand et gagné des dizaines de millions, vous serez blanchi et promu résistant si vous avez donné une obole aux F.F.I au bon moment et remplacé évidemment la photographie du Maréchal par celle agrandie du Général. Les livres de Kenneth Pandar et de de Kérillis nous donnent la clé de cet extravagant état d'esprit: autre chose est d'avoir fait la guerre pour libérer son pays; autre chose est d'avoir paru faire la guerre pour la conquête du pouvoir. Mais aucun document n'est aussi parlant et accusateur que la lettre qu'écrivit Lemaigre-Dubreuil au général De Gaulle, lorsqu'il se décidé à quitter Alger, à la veille d'une perquisition où l'on se proposait de trouver quelque document propre à fournir un prétexte à son arrestation."
Fin de citation.
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