François Delpla a écrit:
sauf erreur c'est toi qui as introduit ici cette formule.
C'est donc à toi de répondre à tes questions .
Soit ! je continue.
Dans sa livraison de mai 2011,la revue
L'Histoire,page 6,
allait publier un bref "rectificatif" ainsi conçu:
"Le discours de Himmler qui fixe les objectifs de la Solution finale
a eu lieu le 9 juin 1942 (et non le 4,p.52 du n°362)".
Himmler n'a parlé que de "migration" forcée des juifs !Au moins cette rectification nous apprend-elle que c'est donc
dans un "discours" que Himmler aurait fixé "l'objectif" et cela
à la date du 9 juin 1942.
Or,les historiens le savent depuis belle lurette,Himmler a prononcé
ce jour-là,au "Foyer des aviateurs",après la cérémonie des funérailles
de Heydrich à Berlin,un discours devant les généraux et les chefs de service
de la SS et de la police.
En passant,il a eu cette phrase (souligné par moi):
"D'ici un an nous aurons assurément terminé avec la migration des juifs,
ensuite il n'en migrera plus aucun.
Car c'est dès maintenant qu'il nous faut exactement faire place nette."Puis,séance tenante,il est passé au cas d'autres migrants qui devraient
eux aussi,faire place nette (souligné par moi):
"Je pense à la migration des travailleurs étrangers qui pourront
plus tard travailler chez nous"Le texte allemand est le suivant:
"Die Völkerwanderung der Juden werden wir in einem Jahr fertig haben,
dann wandert keiner mehr.Denn jetzt muss eben reiner Tisch gemacht werden.
Ich meine die Völkerwanderung der Fremdvölkischen, die später bei uns
arbeiten können" (p.159 de l'ouvrage cité ci-dessous).
Le mot de
"Wanderung" signifie excursion,promenade à pied,voyage à pied,
tour,appliqué à des peuples,comme c'est ici le cas,il se traduit par "migration"
ou "déplacement".
Himmler a donc simplement parlé de "migration" (forcée)
ou de déplacement (forcé) et non d'extermination !Quant au contexte,il plaide clairement en faveur d'une migration forcée ou
d'un déplacement forcé:Himmler évoque une vaste "tâche" (
Aufgabe):
"le peuplement et la migration (ou le déplacement) des peuples européens
que nous sommes en train d'accomplir" (die Siedlung und die Völkerwanderung
in Europa,die wir vollziehen). Il faut,dit-il,d'une part,ramener d'autorité dans
le sein du Reich les peuples germaniques dispersés loin de la mère patrie et,
d'autre part,expulser du Reich tous les éléments qui lui sont étrangers,
par exemple,les juifs mais aussi les travailleurs étrangers actuellement indispensables,
ceux-là,"
s'ils veulent avoir des enfants,ils les auront n'importe où,
mais pas chez nous.
Il ne faut pas que nous les laissions fonder une famille,ni un foyer ni rien d'autre"
"Ils n'ont rien à voir avec le peuple allemand".Le discours de Himmler,dans le texte.Le texte de ce discours est consultable dans:
Heinrich Himmler Gheimreden 1933 bis 1945 und andere Ansprachen(Discours secrets de Himmler de 1933 à 1945 et autres allocutions).
L'ouvrage,de 319 pages,a été publié par Bradley Smith,de Stanford University
en Californie (à ne pas confondre avec le révisionniste californien Bradley R.Smith,
responsable du "CODOH"),et Agnès F.Peterson,également de Stanford,
avec une introduction (pp.13-22) de Joachim C.Fest,historien et journaliste
allemand,à Berlin et Vienne,aux Editions Ullstein en 1974.
Le long discours ici en cause est présenté à la page 145 et occupe
les pages 146-161.
Les notes,au nombre de 38,se lisent aux pages 297-300.
Ce discours qui n'a rien de "secret" et qui est même manifestement public,
traite de toutes sortes de sujets englobant les graves pertes de la SS,
l'emploi des blessés,la redoutable campagne de Russie,le recrutement
des jeunes gens,le repeuplement de l'Allemagne par le regroupement forcé
dans la mère patrie des minorités germaniques dispersées,la préservation
de l'unité raciale,la lutte contre l'influence de l'esprit chrétien,le problème
de l'alcoolisme,celui du tabagisme,la nécessité de l'esprit de camaraderie
et de l'entente au sein de l'administration SS,le refus de pessimisme,
la franchise devant le caractère terrible de certaines situations,la prudence
nécessaire pour éviter des attentats comme celui commis contre Heydrich
et d'autres sujets encore.
"
La guerre n'est pas un instrument destiné à rendre les hommes meilleurs",
prononce Himmler.
"
Beaucoup de jeunes recrues se déroberont (sous l'effet de la peur)"
"Nous avons passablement d'incapables".
Le ton général du discours est proche de celui de la conversation familière.
Un segment d'une extrême brièveté porte sur les juifs:celui que j'ai cité plus haut,
en gras.Il figure à la page 159.Il nous vaut dans une note la remarque suivante
(en allemand) de la part des éditeurs:
"une allusion non voilée à la "Solution finale de la question juive" ! "(page 300,note 38).Tout au long dudit ouvrage les responsables de la publication
ont multiplié les explications,les intrusions,les pures et simples additions destinées
à nous convaincre que des mots ou des expressions comme "éloigner"
"résoudre sans compromis la question (juive)", "migration (forcée)",etc.
cachaient les plus sinistres réalités et signifiaient "extermination" ou "exterminer".
Comprenons ici que Himmler aurait codé son langage et que nos scoliastes,eux,
ont,pour notre édification,énormément décodé.
Ils l'ont fait avec un remarquable aplomb,décrétant,par exemple,que,dans un même
passage où Himmler emploie à deux reprises le mot de "
Völkerwanderung"
(migration des peuples),la première fois au sujet des travailleurs étrangers,
il fallait comprendre qu'appliqué aux juifs le mot signifiait:
"migration au sens caché d'extermination" et qu'appliqué aux travailleurs étrangers
il voulait tout simplement dire "migration" !
C'est se moquer.
Pierre Vidal-Naquet s'était fait une spécialité de ces tours de passe-passe,
aussi bien à propos de certains discours de Himmler,tenus par exemple
à Posen,que sur d'autres sujets.
Voilà cher François Delpla,pour ce qui concerne une "décision" et d'un "objectif" ?