François Delpla a écrit:
Reprenons : la révolution russe a de quoi inquiéter et effrayer les bourgeoisies, même si elles se rassurent en n'accordant pas au bébé beaucoup de chances de survie, fortes de leurs succès sur les insurrections précédentes, et en Allemagne sur les spartakistes, en plein démarrage de la conférence de la paix.
Mais justement : pour consolider ce succès, rien de tel que de garder à Berlin un gouvernement central qui lâche ses troupes sur tout ce qui bouge, et c'est ce qui va se passer, jusqu'à la fin de 1923. Dans quelle mesure ce calcul a-t-il pesé dans les aspects bénins du traité de Versailles, tout en concentrant ses aspects punitifs dans des mesures hautement discutables comme les réparations ou l'affirmation de la culpabilité exclusivement allemande dans le déclenchement de la guerre ? C'est une question qui me travaille et sur laquelle je connais peu d'études.
La bourgeoisie allemande elle joue le jeu : elle préfère perdre sur le plan international la guerre, quitte même à avoir une paix humiliante, du moment qu'elle garde le droit de propriété, du moment que les rouges sont massacrés dans le sang.
En novembre 18, la bourgeoisie allemande a le choix :
-elle continue la guerre. A ce moment, elle la perd sur le front, et en plus elle perd le pouvoir à l'arrière à cause du soulèvement communiste.
-elle lâche le pouvoir aux communistes, mais perd sa fortune, et de toute façon les communistes feront la paix.
-elle fait la paix, à n'importe quel prix, mais garde le pouvoir à l'intérieur en massacrant les rouges.
Evidemment, elle choisit la dernière solution, la seule raison d'être de la bourgeoisie étant de garder et d’accroître sa fortune.
La même logique amènera la bourgeoisie allemande à soutenir Hitler.