Bonjour et bienvenue, Fred !
Evitons autant que possible de situer le débat au niveau d'un membre du forum, même délinquant et multirécidiviste, pour le maintenir au niveau des événements de 1942 et de leur traitement par l'audacieux livre de Florent Brayard.
Cet ouvrage pionnier souffre d'un défaut commun à ses pareils, et déjà dénoncé par un certain prophète vers l'an trente après lui-même : "Ne mettez pas du vin nouveau dans de vieilles outres !"'. Ainsi sa caractérisation de la Solution finale comme un "complot nazi" entre les trois H et un petit minimum de subalternes jure grandement avec sa thèse de 2004 -commentée sur le site dont ce forum est le forum :
http://www.delpla.org/article.php?id_article=124 .
En 2004, Brayard semble écrire à toutes les pages, à propos des fonctionnalistes : "Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là !". Il découpe la "décision" en tranches chronologiques quasi-hebdomadaires, faites de décisions pas à pas dont la logique n'est nullement dans les pas précédents ni le but final, mais uniquement dans le paysage du jour. Du moins avant juin 1942, un moment où l'assassinat de Heydrich, entre autres traits du paysage, aurait déterminé un basculement définitif dans le meurtre exhaustif et rapide.
En 2012, avec cette notion de complot, appliquée entre autres à la réunion de Wannsee, c'est lui qui bascule, qu'il le veuille ou non, qu'il doive mettre des jours, des mois ou des années à le reconnaître, dans la thèse d'une manipulation hitlérienne, masquée à tous ceux qui ne sont pas directement embauchés dans la besogne. Il fait donc de la Solution finale (mais ne semble pas, dans son livre, en prendre encore la moindre conscience) un équivalent, dans le fonctionnement nazi, de l'incendie du Reichstag, du vol de Rudolf Hess, du bluff d'avant Munich préparant le non-bluff d'avant Dantzig, etc. A savoir : une idée formée dans le cerveau de Hitler et débouchant sur le recrutement d'exécutants, les uns au courant, les autres manipulés.
Personnellement, j'avais beaucoup d'avance sur Brayard dans la lecture amusée du journal de Goebbels : dans le décryptement d'un jeu de Hitler consistant, pour s'assurer que la propagande reflétera bien son mensonge du moment, à mentir au ministre chargé de la diriger. Mais l'avancée de Brayard, tout de même, me stimule, témoin ma découverte, sous son inspiration, d'une tromperie de Hitler envers Himmler lui-même, en juin 1942 :
http://www.delpla.org/article.php?id_article=526 .
Plus récente encore -j'ai commencé à en parler sur deux forums
http://deuxiemeguerremondia.forumactif. ... itlerienne http://www.39-45.org/viewtopic.php?f=17 ... 2ed4b5f74d - ma découverte d'une manoeuvre indubitablement hitlérienne, et très connue, mais non comme telle -personne ne semblant à vrai dire s'être jamais posé la moindre question. Il s'agit de l'affaire connue sous le nom du livre et du film qu'elle a inspiré, "La grande évasion", c'est-à-dire la massacre des deux tiers (cinquante exactement, et le chiffre rond ne relève peut-être pas du hasard) des pilotes anglais repris après leur évasion par tunnel du camp de Sagan, le 24 mars 1944. Comme trois dirigeants, non hiérarchisés entre eux, sont concernés -Göring, Keitel, Himmler- et qu'il s'agit d'une transgression sans précédent ni lendemain d'une règle bien établie -l'application des conventions internationales sur les prisonniers de guerre à ceux d'Europe occidentale, ce qui "mouille" également Ribbentrop- la décision ne peut émaner que de leur maître à tous, et être éminemment politique. Il s'agit de faire prendre conscience à tout le monde (au sens propre de l'expression !) à la veille d'une tentative de débarquement occidental en France, que les règles de la guerre à l'est pourront le cas échéant s'appliquer à l'ouest. On est dans une logique qui va s'épanouir à Oradour, puis dans la bataille des Ardennes : Hitler aime mieux les Occidentaux, mais les châtie bien, avant de tenter de les amadouer à coups de menace soviétique.