François DELPLA

Livre d'or

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Ce qui reste à découvrir sur le nazisme

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2010-2020 : sur 1940, la recherche fait du surplace, ou presque


Un mythe à déboulonner disait, jusque vers 1990,
que Churchill avait été appelé à la barre de l'Angleterre le 10 mai quand et parce que le péril nazi devenait évident,
que les élites et la population anglaises l'avaient suivi comme un seul homme,
à quelques nazillons près dûment réprimés,
y compris lors de la défection française
(à se demander pourquoi on attribuait quand même un rôle à son éloquence !),
que ladite défection française était le fait, au contraire, d'élites conspiratrices gangrenant jusqu'à l'entourage du très churchillien Paul Reynaud,
mais que de Gaulle avait été accueilli à bras et micros ouverts,
ce qui avait permis à la France de repartir, progressivement, du bon pied.

1990 avait vu le début du travail au long cours de John Lukacs sur "le duel Churchill-Hitler" entre le 10 mai et le 31 juillet 1940,
la réévaluation de l'ardeur et du moral français par Jean-Louis Crémieux-Brilhac
et le début d'une réflexion, et d'un dévoilement d'archives, sur les premiers pas de la France libre, rendus chaotiques par des hésitations de l'Angleterre.

2000 avait consolidé ces résultats et mis en lumière, notamment, la puissance et la nocivité du ministre Halifax, savonnant la planche de Churchill,
mais avait vu aussi l'épanouissement d'une entreprise réactionnaire, exagérant le caractère hasardeux de l'offensive allemande,
donc minorant et le danger hitlérien, et le mérite churchillien,
à l'instigation d'un historien militaire allemand, Karl-Heinz Frieser.
Un colloque https://www.leslibraires.fr/livre/274408-la-campagne-de-1940-actes-du-colloque-paris--christine-levisse-touze-tallandier et un numéro d'Autrement https://www.amazon.co.uk/Mai-juin-1940-fran%C3%A7aise-allemande-historiens/dp/2862609919 avaient donné à ces errements des lettres de noblesse.

2010 marquait le zénith de l'influence de sir Ian Kershaw, dont le Fateful Choices (2007), prenant enfin à bras le corps le différend Churchill-Halifax, le réduisait à une joute de bonne compagnie, où les meilleurs arguments l'avaient emporté. En contrepoint, le documentaire d'Hugues Nancy sur de Gaulle https://www.dailymotion.com/video/x7ubni8 comportait des révélations, encore partielles, sur les difficultés d'implantation du gaullisme à Londres. Et la publication, enfin, des mémoires de Roland de Margerie jetait sur le moral chancelant de Paul Reynaud une lumière impitoyable.

2020 devait et pouvait être l'anniversaire décisif. Un signe avant-coureur était le film Darkest Hour (fin 2017), appuyé sur une recherche d'archives et un livre homonyme. En dépit d'inexactitudes commandées par les règles de la fiction cinématographique, il présentait avec justesse Halifax non comme le partisan isolé et beau joueur d'une option minoritaire, mais comme le principal animateur d'une tendance anti-churchillienne fébrile et puissante. Autre hirondelle semblant annoncer un printemps, la biographie de Churchill par Andrew Roberts (2018), pourtant fort indulgent pour Halifax dans un livre de 1991. Ici il met en lumière deux points fondamentaux : les rivalités de personnes qui avaient présidé à la nomination de Churchill, en quelque sorte, par défaut, le 10 mai, et la transgression de Halifax, demandant le 25 mai à l'Italie, au nom de son gouvernement, sa médiation dans le conflit, en violation des options churchilliennes avalisées par le cabinet de guerre. Dans la même décennie, de nouvelles biographies de Hitler (Volker Ullrich, 2013-2018, Peter Longerich, 2015, Wolfram Pyta, 2015; et les enquêtes de Thomas Weber sur ses premiers pas, 2010 et 2017) faisaient de plus en plus de place à sa maîtrise politique et militaire, sans minorer pour autant son agressivité, sa cruauté et le caractère délirant de son obsession antisémite. Plus préoccupant était le récit des débuts londoniens de De Gaulle par Julian Jackson dans la première biographie scientifique du Général (2018), traduite et publiée en France fin 2019 : le gouvernement britannique était censé s'être divisé... sur de Gaulle, et non sur Hitler !

2020, pour l'instant (mi-septembre) a accouché d'une souris : un dossier du magazine Guerres et histoire se demandant classiquement si la France a été "trahie", un livre de Rémy Porte également centré sur la France, sa préparation et son moral. Quelques films, notamment sur de Gaulle, plutôt régressifs par rapport à celui d'Hugues Nancy. Pas le moindre colloque à l'horizon.


Il reste un trimestre !

Marines, le 13 septembre 2020
un fil du forum de Bruno Roy-Henry intitulé "Le débat sur mon travail"

webmaster Le: 25/03/15